LE HAMMAN

ou l'art du bien être

LE HAMMAM: l'art raffiné de vivre

Le hammam, endroit vieux comme le monde toujours d'actualité a traversé les époques et les révolutions sans muter, est toujours aussi fréquenté. Ces vieux murs résonnent encore des brouhahas des notables, des coquettes, des courtisanes et des petites gens qui sont venus laver leur enveloppe charnelle et resourcer leur esprit. Ses grandes coupoles percées de ronds de verres pour mieux filtrer la lumière, ses arcades divisant les salles, sa décoration lui donnant l' aspect d'un palais raffiné, le chuintement, le clapotis et le murmure de l'eau, la moiteur et la douce fraicheur du sol en pierre noires et blanches poli par des génerations de visiteurs sied à la méditation, à l'abandon de soi, aux confidences et au bavardage. On vient au hammam pour s'amuser, passer la journée, faire des rencontres, trouver des réponses à ses problèmes ; le hammam avec le café et la mosquée représentent l'essence même du monde arabe.
D'une salle proviennent des cris de joie, des rires et des éclats de voix, c'est la fête aujourd'hui dans le hamman, des amies ont accompagnées la future mariée pour sa toilette nuptiale. Le hamman est encore depuis sa lointaine création un lieu de vie privilégié au Moyen Orient, ces murs pourraient raconter tant de joie et de peine. Pour nous occidentaux le hamman est entouré d'un halo de mystère, que doit-il se passer dans ses murs si épais d'où rien ne transpire ? Dès l'entrée on est agréablememt surpris par les reflets du soleil jouant sur les vieilles pierres, les boiseries, les mosaiques, les lanternes, les bassins et les fontaines ; les corps sont dévétus, les nudités s'exposent sans fausse pudeur, sans vergogne, ici c'est le temple du culte de l'eau qui vous invite à s'amuser avec elle de mille façons. Eau débordant des fontaines, eau se fracassant sur le sol, eau jettée sur les corps à peine lavés et frottés, l'eau dans le hamman est synonime de bonheur, de bien être et d'oubli, sans elle cette joyeuse atmosphère ne serait pas possible. Accroupies devant les fontaines, s'aspergant abondament d'eau tiède, voire très chaude, les femmes se lavent tout en échangeant des confidences. Femmes aux rondeurs porteuses de vie, femmes au corps sveltes ou flasques, petites filles s'éveillant à la vie, toutes apprécient ce moment de détente loin de l'univers suffocant des hommes. De leur côté les hommes font de même, on ne mélange pas le masculin et le féminin au hamman !
Dans le caldarium une épaisse vapeur humide entre en action pour combattre les impuretés, les corps sont délicatement baignés avec de l'eau à peine tiède provoquant de délicieux frissons avant de fondre sous les caresses sensuelles des mains expertes des esthéticiennes d'une autre époque: elles vous frottent, savonnent, lavent, tournent et retournent jusqu'a qu'elles soient satisfaites de leur soin puis leurs doigts de fée soulagent les zones douloureuses de nos chairs veillissantes; depuis des millénaires ils ont tellement pétris de corps, vu tellement de misères qu'ils les devinent au premier coup d'oeil, au premier contact avec le grain de la peau.
Dans la salle de repos, délicieusement fatiguées, propres comme au premier jour de la vie, des piles de serviettes en pur coton innaculé attendent de s'enrouler autour de nos hanches et de nos épaules prolongeant ainsi le plaisir de la toilette par son doux contact. Allanguies sur des divans qui ont vu des milliers de corps beaux et usés, lentement, tout en sirotant un thé à la menthe presque trop sucré on se prend à rêver à une vie sans soucis comme celle que devaient avoir les compagnes de Schéhérazade.